Le peuplier
« Un seul hêtre vous manque et tout est des peupliers »
Jean Paul Grousset
L’étymologie du mot oscille entre celle du latin « populus » qui évoquerait le peuple et les rangées de peupliers (alignés autour des places ou des chemins romains) seraient comme un symbole de la foule humaine et celle du grec « papalein »qui souligne la capacité de l’arbre à se tordre sous le vent et pourrait, donc, « se plier ».
Il est vrai que le peuplier est très présent dans les différents milieux des régions tempérées à froides depuis que le climat tempéré a permis le développement des arbres sur notre continent. Il en est une des caractéristiques.
Il croit très rapidement surtout au bord des zones humides (avec le saule). Et est utilisé par l’homme en populiculture car la rotation de ses sujets se fait très rapidement (en gros tous les10 à 20 ans) et leur fûts très droits fournissent des planches de couleur claire pour le contreplaqué ou la décoration, les allumettes, les boites de fromage, les outils médicaux et tous les contenants à usage unique remplaçant le plastique (car il est inodore, incolore et sans goût).
Dans le contexte humide, il est très apprécié des castors car il drageonne très facilement après leurs abattages musclés.
Son système racinaire est extrêmement puissant et s‘étend plutôt à une faible profondeur mais sur des surfaces étendues. Il peut détruire des murs, soulever des enrobés bitumés ou pénétrer dans les tuyaux d’égouts. Il est déconseillé aux abords des maisons pour ces raisons.
Il peut supporter des sols sableux ou pauvres.
Par contre, il n’apprécie pas les forêts.
Sa très haute masse foliaire est un refuge pour des dizaines d’espèces d’oiseaux. Ils s’y cachent et sont plus à l’abri des prédateurs dans ce couvert sommital.
Cela se vérifie pour les nôtres, situés plutôt à la périphérie de la futaie (à la limite Est du Parc sur la première parcelle des neuf maisons et visé directement par l’abattage, donc.)
Le plus grand qui domine le parc par sa hauteur est associé dans cette zone aux épicéas de bordure et à des bouleaux. Son tronc, chemisé de lierre, est de 2m24 de diamètre et son toupet mouvant est animé par le pigeons ramiers, les tourterelles, des merles, un pic qui fait entendre régulièrement son tap-tap caractéristique, et des loriots qui s’aventurent parfois à venir goûter les pommes de la clôture du jardin mitoyen. Trois arbres concentrent des oiseaux à cet endroit : un laurier sauce de belle taille, le grand peuplier et un thuya où se chamaillent à la tombée de la nuit jusqu’à une trentaine de mésanges charbonnières dont c’est la maison.
Un peu plus loin un petit marronnier se blottit entre son tronc et celui du hêtre pourpre (déjà évoqué). Ce sera le sujet d’une autre rubrique.
L’autre peuplier, son petit frère, a un tronc de 81 cm. Il s’étire vers le ciel derrière le cèdre du Liban et à côté des sapins de Nordmann .
Tel un puissant géant, gardien du Parc, le grand sujet lance des signaux de loin à l’araucaria situé dans le coin opposé sur la limite ouest des 7000m² de cette zone et le petit, telle une antenne relai, pointant son nez, prend part à cette silencieuse mais dense conversation entre tous ceux rassemblés là.
À nous de leur permettre de la prolonger et de nous en apporter tous les bienfaits et la beauté.
« Je n’existe que pour mieux m’extasier devant tout ce que j’invente : quand je vois un peuplier, c’est moi qui le fais ; à l’instant même, et il meurt dès que je meurs à lui »
Leo Férré, in « Benoît Misère » (1970)